Congés payés : préparez-vous aux nouvelles règles !

Congés payés : préparez-vous aux nouvelles règles !

Avez-vous déjà fait le tour de toutes les conséquences des décisions de la Cour de cassation du 13 septembre 2023 sur la  gestion des congés payés dans votre entreprise ?

Je suis certain que non et ce malgré toute la communication sur le sujet.

Dans tous les cas, il fallait s’y attendre !

Cela faisait 10 ans que la Cour de cassation pointait dans ses rapports annuels que la législation française sur les règles en matière d’acquisition des congés payés n’était pas en conformité avec le droit européen (Directive n° 2003/88/CE du 4 novembre 2003 Art.7).

En cause, plus particulièrement, les périodes d’absences pour cause de maladie non professionnelle non assimilées à du temps de travail effectif par la législation française.

C’est ainsi que le 13 septembre 2023, au terme de 5 arrêts, la Cour de cassation a franchi un nouveau pas en alignant sa position sur celle de la directive et a jugé que les salariés malades ou accidentés auront droit à des congés payés sur leur période d’absence, même si cette absence n’est pas liée à un accident de travail ou à une maladie professionnelle (Cass. Soc., 13 sept.2023, nº 22-17.340 – 341 et 342).

Mais ce n’est pas tout.

Elle écarte également les dispositions de l’article L.3141-5 du Code du travail qui limitent à une période ininterrompue d’un an d’arrêt de travail, l’acquisition des congés payés en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle (Cass. Soc., 13 sept.2023, nº 22-17.638).

Autre point important.

La règle applicable jusqu’alors en matière de prescription des congés qui en fixait le point de départ à l’expiration de la période (légale ou conventionnelle) au cours de laquelle les congés auraient pu être pris, est écartée au profit de la règle selon laquelle :

Le délai de prescription de l’indemnité de congé payé ne peut commencer à courir que si l’employeur a pris les mesures nécessaires pour permettre au salarié d’exercer effectivement son droit à congé payé (Cass. Soc., 13 sept.2023, nº 22-10.529).

Comme vous pouvez le constater, les changements sont importants et potentiellement lourds de conséquences pour les entreprises.

Patrick MARTIN, le patron du MEDEF, estime le coût pour les entreprises de ces nouvelles règles à 2 milliards d’euros.

Désormais, le législateur n’a plus guère le choix que d’intervenir pour aménager les règles d’acquisition des congés payés de notre législation nationale afin de tenir compte des solutions dégagées par la Cour de cassation.

Aura-t-il aussi la volonté d’en minimiser les impacts à l’égard des entreprises ?

Il est encore trop tôt pour se pencher sur cette question et ce d’autant plus que ses marges de manœuvre apparaissent très limitées.

Alors, je vous propose de laisser de côté ces préoccupations pour revenir aux fondamentaux sur les règles d’acquisition des congés payés.

En effet, selon notre expérience au sein du cabinet, au regard des échanges avec nos clients, il nous est apparu important de reprendre toutes les notions essentielles sur ce sujet assez technique.

Bien sûr, nous vous donnerons aussi nos premiers conseils pour mieux faire face aux changements à opérer et aussi pour pouvoir répondre aux questions qui se sont déjà posées ces dernières semaines.

Sommaire masquer

1. Quels sont les bénéficiaires des congés payés ?

Le droit aux congés payés est un droit absolu.

En effet, tout salarié doit bénéficier de ce droit, et ce, peu importe :

  • Sa nationalité,
  • La nature de son contrat de travail : CDI, CDD, contrat d’apprentissage
  • Sa catégorie professionnelle. Les cadres bénéficient de congés payés dans les mêmes conditions que les autres salariés, qu’ils soient ou non régis par des conventions de forfait en heures ou en jours.

Pour certains salariés, le congé est dû selon des modalités particulières, c’est le cas par exemple des concierges d’immeuble, des VRP, des gérants non-salariés, des employés de maison, des travailleurs à domicile…

2. Quelles sont les conditions d’ouverture du droit à congés payés ?

L’article L.3141-12 du Code du travail pose le principe selon lequel l’ouverture du droit à congé est effective dès le premier jour de travail.

Finies donc les dispositions antérieures qui subordonnaient l’ouverture du droit à congés payés à un minimum d’un mois de travail effectif, puis de 10 jours.

Il s’agissait déjà là d’une première étape vers la mise en conformité du droit national avec le droit de l’Union Européenne.

  • CJCE, 26 juin 2001, arrêt Bectu : les États membres doivent prendre les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au moins 4 semaines. Le Code du travail ne peut pas limiter unilatéralement le droit au congé annuel payé conféré à tous les travailleurs en appliquant une condition d’ouverture, qui a pour effet d’exclure certains travailleurs du bénéfice du droit aux congés payés.
  • CJCE, 20 janvier 2009, affaire Schultz-Hoff et Stringer : le droit au congé annuel payé conféré par la directive 2003/88 ne peut être subordonné par un État membre à l’obligation d’avoir effectivement travaillé pendant la période de référence.
  • Confirmé par CJUE, 24 janvier 2012, arrêt Dominguez : la directive ne permet pas de subordonner le droit au congé annuel payé à une période de travail effectif de 10 jours durant la période de référence.

Votre salarié acquiert donc des congés payés lorsqu’il est en période d’essai.

Si cette période est rompue avant son terme, une indemnité compensatrice lui sera donc due et ce quel que soit le nombre de jours qu’il aura travaillé.

Notez au passage que si votre salarié prend des jours de congés pendant sa période d’essai, celle-ci sera alors rallongée du nombre de jours de congés pris.

Néanmoins, il ne peut y avoir prolongation de la période d’essai si l’absence du salarié est due à l’employeur (cas de l’absence pour cause de formation) ou encore du fait des jours fériés.

Il y a 2 cas particuliers.

  • Les salariés sous CDD qui ont droit à une indemnité compensatrice de congés payés quelle que soit la durée du contrat, dès lors que le régime des congés applicable dans l’entreprise ne leur permet pas de les prendre pendant la durée du contrat (Article L.1242-16 du Code du travail).
  • Les intérimaires qui ont droit à une indemnité de congés payés pour chaque mission qu’ils effectuent, peu importe la durée de cette dernière (Article L.1251-19 du Code du travail).

3. Sur quelle période de référence se baser pour l’acquisition des congés payés ?

Le Code du travail fixe la période de référence, qui ne coïncide pas avec l’année civile.

Cependant, une convention ou un accord collectif qui organise une répartition de la durée du travail sur tout ou partie de l’année peut toujours fixer le point de départ à une autre date.

PrincipeCas particulier : l’entreprise à l’obligation de s’affilier à une caisse de congés payés
  • La période de référence commence le 1ᵉʳ juin de l’année précédente et se termine le 31 mai de l’année en cours.
  • Au titre de l’année 2023, la période de référence s’étend du 1ᵉʳ juin 2023 au 31 mai 2024.
  • La période de référence s’étend du 1ᵉʳ avril au 31 mars.
  • Cela vise les professions du bâtiment et des travaux publics, les entreprises de manutention et de transport, les dockers et les entreprises du spectacle.

À retenir :

Lorsque votre salarié intègre l’entreprise en cours d’année, sa période de référence débute à compter de sa date d’arrivée dans l’entreprise.

Et dans le cas d’un départ en cours d’année, la période de référence prend fin à l’expiration du préavis.

Dans le cas où vous dispenseriez le salarié d’exécuter son préavis, la période de référence se termine à la date à laquelle le préavis aurait normalement expiré s’il avait été effectué par votre salarié (Cass. Soc., 24 nov. 1992, nº 90-42.764).

4. Comment calcule-t-on la durée des congés acquis ?

a. Principe : le calcul de la durée légale du congé

Pour connaître le nombre de jours de congés acquis par un salarié, déterminez d’abord la période de référence qui le concerne.

Le nombre de jours de congé se calcule sur la période de référence qui court en principe du 1ᵉʳ juin de l’année précédente au 31 mai de l’année en cours.

Sur cette période de référence, le salarié a droit à 2,5 jours ouvrables de congés par mois de travail effectif, sans que la durée totale du congé ne puisse excéder 30 jours ouvrables, c’est-à-dire 5 semaines (article L.3141-3 du Code du travail).

Lorsque le salarié a travaillé moins d’un mois, la durée du congé est proportionnelle au temps travaillé

Cependant, il peut y avoir des dispositions plus favorables aux salariés.

Ainsi, cette durée légale peut être augmentée par les accords et conventions collectifs, le contrat de travail ou encore les usages.

Cette durée du congé peut être majorée en raison de l’âge, de l’ancienneté ou encore du handicap.

Prenons un exemple.

Si M. DURAND a travaillé pendant 5 mois durant la période de référence, il a donc droit à 2,5 x 5 = 12,5 jours ouvrables, soit 13 jours de congés payés.

En effet, une règle prévoit que si le nombre de jours ouvrables de congés n’est pas un nombre entier, la durée du congé est portée au nombre immédiatement supérieur (Article L.3141-7 du Code du travail).

b. Et dans le cas des salariés à temps partiel, quel est le principe ?

Pour ces derniers, leur horaire de travail est inopérant sur la durée des congés.

En clair, les salariés à temps partiel ont les mêmes droits à congé que les salariés à temps complet.

Ainsi, un salarié qui travaille selon un horaire de 24 heures par semaine va acquérir deux jours et demi de congé à l’identique du salarié qui travaille 35 heures par semaine.

Le problème qui est souvent rencontré en matière de gestion des congés des salariés à temps partiel concerne moins le régime d’acquisition que le régime de décompte des jours de congés.

Sur ce dernier point, les erreurs sont fréquentes.

La même règle d’acquisition s’applique pour les congés supplémentaires d’origine conventionnelle.

Ils ne peuvent être réduits en fonction de la durée du travail ou de sa répartition dans la semaine.

5. Je souhaite calculer les droits à congés en jours ouvrés et non en jours ouvrables. Est-ce que j’en ai le droit ?

Oui, c’est possible selon la Cour de cassation (Cass. Soc., 4 déc. 1990, 85-41.289), mais à la condition que le régime appliqué ne défavorise pas le salarié par rapport au calcul qui résulte de l’article L. 3141-3 du Code du travail qui détermine la durée des congés en jours ouvrables (Cass. Soc., 27 mai 1992, 91-40.423 ; Cass. Soc., 8 juill. 1992, no 90-42.746).

Le même principe s’applique si vous souhaitez décompter les jours de congés en jours ouvrés et non en jours ouvrables, c’est-à-dire en jours collectivement travaillés dans l’entreprise (jours d’ouverture).

Vous pouvez prendre cette décision dans le cadre d’un accord collectif.

Cette exception peut aussi trouver à s’appliquer en vertu d’un usage dans l’entreprise ou encore, d’une décision unilatérale que vous pourriez prendre.

Précision : les jours ouvrables sont tous les jours de la semaine, à l’exception du jour de repos hebdomadaire, donné généralement le dimanche (C. trav., art. L. 3132-3) et des jours fériés habituellement non travaillés dans l’entreprise.

Vous pouvez décompter les jours de congés en jours ouvrés. Mais vous devez donc respecter une condition essentielle.

Ce mode de décompte en jours ouvrés ne doit pas aboutir en pratique à un résultat défavorable pour le salarié par rapport au régime légal de décompte en jours ouvrables.

Qu’est-ce que cela signifie ?

Concrètement, une comparaison doit être faite entre le décompte en jours ouvrés et le décompte en jours ouvrables.

Cette comparaison s’effectue globalement sur l’ensemble de la durée du congé, et non pour les différentes périodes fractionnées (Cass. Soc., 30 oct. 1997, nº 95-41.947).

Prenons un exemple :

En 2023, le 11 novembre tombe un samedi.

Un salarié qui pose sa semaine de congés du 2 au 12 novembre se verra décompter :

  • Dans le cas d’un décompte en jours ouvrables : 5 jours ouvrables au lieu de 6 puisque le samedi 11 novembre est férié, il n’est pas compté comme jour de congé.
  • Dans le cas d’un décompte en jours ouvrés : 5 jours ouvrés parce que le samedi n’est jamais décompté dans ce type de calcul.

Par conséquent, le salarié qui se voit décompter les jours en ouvrés perd un jour de congé par rapport à un décompte en jours ouvrables.

En fin de période de prise des congés payés, vous devrez donc analyser la situation de chacun et voir si le décompte lui a été défavorable selon les périodes de ses prises de congé.

Dans le cas visé plus haut, il convient donc de rajouter un jour de congé au salarié concerné.

Si le décompte en jours ouvrés ne lui est pas défavorable, le salarié ne peut pas s’y opposer (Cass. Soc., 27 mars 1996, nº 92-43.655).

Le décompte des congés payés effectué en heures est illégal et interdit (Cass. Soc., 11 mars 1998, nº 96-16.553).

À retenir aussi le principe selon lequel le décompte des congés payés pris ne peut se faire qu’en nombre de jours entiers (Cass. soc., 13 sept. 2023, no 21-25.408).

6. L’importance de la notion de travail effectif pour l’acquisition des congés payés

Selon l’article L.3141-3 du Code du travail, un salarié a droit à 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur, dans la limite de 30 jours ouvrables, sauf accord plus favorable.

Ainsi, les droits du salarié sont calculés en fonction des périodes de travail effectif recensées au cours de la période de référence.

Que recouvre cette notion de travail effectif qui n’est pas défini par la loi, mais par la jurisprudence pour laquelle il s’agit des périodes réellement travaillées dans l’entreprise (Cass. Soc., 16 déc. 1981, nº 79-42.472).

a. Les périodes d’absence assimilées par la loi à des périodes de travail effectif n’ont aucune incidence sur la durée des congés.

Selon l’article L.3141-5 du Code du travail, sont considérées comme du temps de travail effectif :

  • Les périodes de congés payés de l’année précédente,
  • Les périodes de congé de maternité, de paternité, d’adoption et d’accueil de l’enfant,
  • Les contreparties obligatoires en repos des heures supplémentaires,
  • Les jours de repos accordés au titre de l’accord collectif,
  • Les périodes pendant lesquelles un salarié se trouve maintenu ou rappelé au service national à un titre quelconque,
  • Les périodes de suspension du contrat de travail pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle, dans la limite d’une durée ininterrompue d’un an.

Désormais, cette limite d’un an n’est plus applicable depuis le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation du 13 septembre 2023.

b. Les autres textes qui assimilent les absences à du temps de travail effectif

  • La journée d’appel de préparation à la défense (art. L.3142-97 Code du travail),
  • Le congé individuel de formation (L.6322-13 du Code du travail),
  • Le congé pour effectuer un bilan de compétences (L.6322-46 du Code du travail),
  • Le congé pour faire valider les acquis de l’expérience professionnelle (L.6422-3 du Code du travail),
  • Le congé lié à un projet de transition professionnelle (L.6323-17-4 du Code du travail),
  • Le congé de formation économique, sociale et syndicale (L.2145-10 du Code du travail),
  • Le congé de formation à la sécurité (R.4141-5 du Code du travail),
  • Le congé de formation économique des membres du CSE (L.2315-63 du Code du travail),
  • Le congé de formation en santé, sécurité et conditions de travail à destination des membres du CSE (L.2315-18),
  • Le temps passé en heures de délégation par les représentants du personnel (L.2325-10 du Code du travail),
  • Le temps pour préparer et participer à la négociation annuelle dans l’entreprise (L.2232-18 du Code du travail),
  • Le congé de formation des cadres et animateurs pour la jeunesse (L.3142-55),
  • Le congé de formation des jeunes travailleurs (L.6322-61 du Code du travail),
  • Les congés légaux pour évènements familiaux (L.3142-2 du Code du travail),
  • Les absences pour dons d’ovocytes (L.1244-5 du Code de la santé publique et L.1225-16 du Code du travail),
  • Le congé accordé aux salariés candidats au Parlement, au Parlement européen ou un mandat local pour participer à la campagne électorale (L.3142-82 du Code du travail),
  • Les congés accordés aux membres des conseillers de prud’hommes pour participer à des stages de formation (L.1442-6 et L.2145-10 du Code du travail),
  • Les absences des futurs pères et mères pour se rendre aux examens médicaux obligatoires dans le cadre de la surveillance médicale de la grossesse et des suites de l’accouchement (L.1225-16 du Code du travail),
  • Le congé de formation des administrateurs d’une mutuelle (L.3142-37 du Code du travail),
  • Le temps passé par les conseillers prud’homaux salariés pour l’exercice de leurs fonctions (L.1442-6 du Code du travail),
  • Le temps d’exercice des fonctions d’assistance ou de représentation devant les conseils de prud’hommes par le défenseur syndical pendant les heures de travail (L.1453-6 du Code du travail),
  • Le temps passé hors de l’entreprise durant les heures de travail par les salariés membre d’un conseil ou administrateurs salariés des organismes de sécurité sociale pour exercer leurs fonctions (L.231-9 du Code de la sécurité sociale),
  • Le temps de mission et de formation des sapeurs-pompiers volontaires (L.723-14 du Code de la sécurité intérieure),
  • Le temps passé à l’exercice du droit d’expression (L.2281-4 du Code du travail),
  • Les périodes d’activité dans la réserve opérationnelle (L.3142-91 du Code du travail),
  • Le temps passé hors de l’entreprise pendant les heures de travail par le conseiller du salarié pour l’exercice de sa mission (L.1232-9 du Code du travail),
  • Les heures chômées au titre de l’activité partielle (R. 5122-11 du Code du travail),
  • La période d’absence correspondant à la prise de jours de repos cédés par d’autres salariés (L.1225-65-1 du Code du travail),
  • Le congé de solidarité internationale (L.3142-68 du Code du travail),
  • Le temps passé hors de l’entreprise pendant les heures de travail des salariés participant en tant que membre aux réunions du conseil d’administration du fond d’action sociale pour les travailleurs immigrés et leurs familles, d’une commission régionale pour l’insertion des populations immigrés ou du conseil national des populations immigrées (L. 85-772 du 25 juillet 1985 – Art.38),
  • La réserve de sécurité nationale (L.2171-4 du Code de la défense),
  • La période d’activité dans la réserve de la sécurité civile (L.724-9 du Code de la sécurité intérieure),
  • Les périodes d’emploi et de formation des réservistes sanitaires (L.3133-4 du Code la santé publique),
  • Le congé de représentation dans les associations et les mutuelles (L. 3142-62 du Code du travail),
  • Le temps passé hors de l’entreprise pendant les heures de travail des salariés membres des chambres d’agriculture (L 515-3 du Code rural),
  • Le temps passé hors de l’entreprise durant les heures de travail des salariés qui assurent la représentation d’associations familiales pour participer à leurs réunions (L.211-13 du CASSF),
  • La période de suspension du contrat de travail pendant laquelle un réserviste effectue une période d’emploi ou de formation au titre de la réserve civile de la police nationale (L.411-13 du Code de la sécurité intérieure),
  • Le temps passé à l’exercice des fonctions au sein des conseils de l’ordre des médecins, des pharmaciens, des infirmiers et des masseurs kinésithérapeutes (L.4125-3, L. 4233-4, L. 4321-19 du Code de la santé publique).

c. Les absences assimilées à du temps de travail effectif par la jurisprudence

  • Les absences pour cause de maladie non professionnelle permettent désormais l’acquisition de congés payés (Cass. soc., 13 sept. 2023, no 22-17.340).
  • Les absences consécutives à un accident du trajet sont assimilées aux périodes pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle (Cass. soc., 3 juill. 2012, n° 08-44.834).
  • En cas de licenciement annulé par décision judiciaire, le salarié peut être réintégré dans son emploi. Il est en droit de faire valoir tous les droits au congé annuel payé acquis durant sa période d’éviction comprise entre la date de son licenciement illégal et la date de sa réintégration dans son emploi.  Pour cela, le salarié ne doit pas avoir occupé un autre emploi durant la période d’éviction comprise entre la date du licenciement nul et celle de la réintégration dans son emploi (Cass. soc., 1ᵉʳ mars 2023, n° 21-16.008). L’indemnité de congés payés est également due si le salarié n’a pas pu être réintégré parce qu’il avait fait valoir ses droits à la retraite (Cass. soc., 21 sept. 2022, no 21-13.552).

À lire aussi : la question de la méthodologie de calculs des absences en paie.

7. L’acquisition des congés payés et les règles d’équivalence

Le principe est que les absences non assimilées à du temps de travail effectif peuvent entrainer une réduction des droits à congé du salarié.

À défaut de dispositions conventionnelles plus favorables, les absences non assimilées à du temps de travail effectif peuvent être catégorisées de la manière suivante.

Nature de l’absence non assimilée à du temps de travail effectif
Absences liées à la santé du salarié
  • Cure Thermale
Congés liés à la formation ou au reclassement
  • Congé d’enseignement ou de recherche
  • Congé de reclassement (pour la période excédant la durée du préavis)
  • Absence prévue par le plan de sauvegarde de l’emploi
Absences liées à la vie familiale
  • Congé de présence parentale total
  • Congé de solidarité familial
  • Congé de soutien familial
  • Congé parental d’éducation total
  • Congé légal pour enfant malade
  • Congé de proche aidant
Autres
  • Mise à pied
  • Préavis non exécuté à la demande du salarié
  • Grève
  • Absences pour assurer la mission de juré ou de témoin
  • Congé de solidarité internationale
  • Congé pour création d’entreprise (à temps plein)
  • Congé sabbatique
  • Chômage-intempéries avec semaine calendaire complète

La réduction des droits à congé ne peut être que proportionnelle à la durée de l’absence.

Des équivalences sont prévues pour permettre de prendre en compte les mois de travail incomplets.

Ainsi, l’incidence de l’absence sur la durée des congés s’apprécie selon la règle la plus favorable au salarié parmi les trois modes de calcul possible.

  • La règle normale de décompte de congé par mois de travail.
  • La règle d’équivalence en semaines : 2,5 jours pour chaque période équivalente à 4 semaines.
  • La règle d’équivalence en jours : 2,5 jours pour chaque période, selon la répartition de l’horaire, de 24 jours, 22 jours ou 20 jours.

Des absences dont la durée cumulée est inférieure ou égale à quatre semaines n’ont pas d’influence sur les droits à congé. En effet, le salarié peut bénéficier de la totalité des congés payés, puisqu’il suffit de 48 semaines (4×12) pour bénéficier de la totalité des congés payés.

Règle d’équivalence en semaines : périodes équivalentes à 4 semaines assimilées à un mois de travail effectif Le salarié justifiant de 48 semaines de travail a droit à un congé intégral
Règle d’équivalence en jours : périodes équivalentes à 24 jours de travail assimilées à un mois de travail Pour un horaire réparti sur 6 jours par semaine

6 x 4 = 24

288 jours de travail sont nécessaires pour ouvrir droit à un congé de 30 jours ouvrables (ou de 25 jours ouvrés)

288 / 24 = 12

12 x 2,5 = 30

Pour un horaire réparti sur 5 jours et demi

5,5 x 4 = 22

264 jours de travail ouvrent droit à 30 jours de congé (ou de 25 jours ouvrés)

264 / 22 = 12

12 x 2,5 = 30

Pour un horaire réparti sur 5 jours

5 x 4 = 20

240 jours de travail ouvrent droit à 30 jours de congé (ou de 25 jours ouvrés)

240 / 20= 12

12 x 2,5 = 30

8. Les impacts des arrêts du 13 septembre sur votre gestion des congés payés

Les règles changent, que convient-il d’ores et déjà de mettre en place ?

a. Revoir le paramétrage de votre logiciel de paie

Ce point est à réaliser à 2 niveaux.

i. Pour les absences maladie non-professionnelle

En application de la jurisprudence du 13 septembre 2023, les absences pour cause de maladie non professionnelle permettent désormais d’acquérir des congés payés.

Cet impact est tout relatif.

En effet, il ne vaut que pour les salariés qui ont une absence d’une durée supérieure à un mois ou 4 semaines en application des règles d’équivalence décrites ci-dessus.

À noter que non seulement le salarié absent pour cause de maladie non professionnelle acquiert des congés payés légaux, mais également les congés payés conventionnels.

Ces derniers sont en effet bien visés en tant que tels par la Cour de cassation dans ses deux premiers arrêts.

À lire aussi : tout savoir sur le traitement des arrêts maladie en paie.

ii. Pour les absences pour cause d’accident du travail et de maladie professionnelle

Dorénavant, il n’y a plus de limite dans le temps à l’acquisition de ces congés payés puisque la Cour de cassation a remis en cause le délai ininterrompu d’un an à l’issue duquel un salarié absent pour cause d’accident du travail (ou de maladie professionnelle) n’acquérait plus de congés payés.

À date, il n’a pas été évoqué la question de l’accident de trajet assimilé par la jurisprudence à l’accident de travail.

Il ne fait que peu de doute qu’il sera impacté de la même manière sur ce point, au même titre que les rechutes consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle d’ailleurs.

b. Faire un état des lieux actuel par rapport aux droits en cours des salariés présents

Cet état des lieux doit permettre de prendre la mesure des corrections à apporter au titre de l’année en cours et aussi au titre des deux dernières années sur lesquelles s’applique la prescription des congés.

Ce bilan comptable, une fois dressé, permettra donc d’évaluer les corrections éventuelles à apporter aux provisions pour congés payés et leur impact sur la gestion de l’entreprise.

c. Adapter la communication de l’entreprise sur le sujet

Beaucoup d’informations ont circulé depuis les arrêts de la Cour de cassation.

Une information de la direction adaptée à son contexte spécifique doit-être élaborée pour permettre une communication claire à destination des représentants du personnel, mais aussi des salariés suivants leur situation au regard des changements intervenus et à venir.

d. Revoir les processus de gestion des congés payés

C’est certainement le point le plus important pour assurer une bonne gestion des congés payés.

Rappelons que l’un des arrêts du 13 septembre (Cass. soc., 13 sept. 2013, no 22-10.529) porte sur la prescription.

Jusqu’à cet arrêt, ce point de départ était fixé à l’expiration de la période (légale ou conventionnelle) au cours de laquelle les congés auraient pu être pris.

Désormais, la Cour de cassation décide :

Que lorsque l’employeur oppose la fin de non-recevoir tirée de la prescription, le point de départ du délai de prescription de l’indemnité de congés payés doit être fixé à l’expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés payés auraient pu être pris, dès lors que l’employeur justifie avoir accompli les diligences qui lui incombent légalement afin d’assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit à congé.

Concrètement, cela signifie que l’entreprise supporte la charge de la preuve sur ce point.

Pour opposer la prescription à un salarié, il apparaît nécessaire de respecter notamment les formalités légales suivantes :

  • Les informations et consultations aux représentants du personnel ou à défaut l’information aux salariés sur la période des congés payés et sur l’ordre des départs en congés payés.
  • Les obligations d’affichage (période d’ouverture des congés payés, ordre des départs).
  • Le suivi de la prise effective des jours de congés dans le respect des règles (12 jours ouvrables continus…).

Sur cette question, l’analyse de la jurisprudence de la CJUE met en évidence que l’employeur est tenu d’une véritable obligation d’incitation et d’information (CJUE, 6 nov. 2018, no C-684/16, Max Planck) :

L’employeur doit inciter le travailleur «au besoin formellement» à prendre ses congés «tout en l’informant de manière précise et en temps utile pour garantir que lesdits congés soient encore propres à garantir à l’intéressé le repos et la détente auxquels ils sont censés contribuer, de ce que, s’il ne prend pas ceux-ci, ils seront perdus à la fin de la période de référence ou d’une période de report autorisée».

Il n’est donc plus possible pour l’entreprise de se retrancher derrière ses propres carences pour faire faire courir le délai de prescription.

Si tel n’est pas le cas, il est impératif d’instaurer des processus de gestion solides juridiquement et qui soient aussi très opérationnels.

Les enjeux en termes de protection de l’entreprise sont de taille.

Conclusion : une nouvelle gestion des congés s’impose suite aux arrêts du 13 septembre 2023 de la Cour de cassation

Par une série de 5 arrêts rendus le 13 septembre 2023, la Cour de cassation a aligné sa jurisprudence sur celle du droit européen.

Selon ces arrêts :

  • Le salarié dont le contrat de travail est suspendu pour cause de maladie non professionnelle peut prétendre à des congés payés au titre de cette période.
  • Le salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle dont le contrat de travail a été suspendu au-delà d’une durée ininterrompue d’un an peut prétendre à des congés payés au titre de cette période.
  • Les règles en matière de prescription pour l’indemnité de congés payés ont changé. Désormais, le point de départ du délai de prescription de l’indemnité de congés payés doit être fixé à l’expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés payés auraient pu être pris et à la condition que l’employeur justifie avoir accompli les diligences qui lui incombent légalement afin d’assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit à congé.
  • Lorsqu’un salarié s’est trouvé dans l’impossibilité de prendre ses congés payés annuels au cours de l’année de référence en raison de l’exercice de son congé parental, les congés payés acquis à la date du début du congé parental doivent être reportés à la date de reprise du travail.

À lire aussi : la question du report des congés payés non pris du fait d’une absence pour cause de maladie non-professionnelle.

Face à ces changements, les premières mesures à prendre sont notamment les suivantes :

  • Revoir le paramétrage de votre logiciel de paie :
    • Pour les absences liées à la maladie non-professionnelle,
    • Pour les absences pour cause d’accident du travail, de maladie professionnelle,
    • Pour intégrer la règle d’équivalence si celle-ci n’est pas déjà intégrée.
  • Évaluer les risques pour l’entreprise en réalisant un état des lieux actuel par rapport aux droits en cours des salariés présents.
  • Adapter la communication de l’entreprise sur le sujet à l’égard des salariés et des représentants du personnel.
  • Instaurer des processus de gestion des congés payés si vous n’en avez pas ou sécuriser ceux que vous avez mis en place le cas échéant.

À propos de l’auteur

Avocat et Médiateur | Plus de publications

Claude conseille les chefs d’entreprise sur les aspects juridiques et RH de leur gestion sociale. Il assure aussi leur défense devant les juridictions dans le cadre des litiges qui les opposent avec les salariés ou les administrations.
Chez Human Avocats, notre équipe d’avocats et de consultants est dédiée à la gestion sociale des entreprises que nous accompagnons en proposant une démarche transverse des problématiques juridiques et opérationnelles des RH et de la paie.

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