8 méthodes de calcul des absences en paie : laquelle est la bonne ?

8 méthodes de calcul des absences en paie : laquelle est la bonne ?

Vous le saviez déjà ! Réaliser la paie en France est un vrai casse-tête.

Cet article sur les méthodes de calcul des absences en paie est la parfaite illustration.

Lorsque aucune absence ne survient dans le courant du mois, réaliser la paie est assez simple, surtout depuis la loi sur la mensualisation de 1978, qui a largement généralisé le paiement au mois.

Ainsi, lorsque le salaire est mensualisé, son montant ne varie pas, quel que soit le nombre de jours travaillés dans le mois.

Dès lors, les conséquences de la répartition inégale des jours entre les douze mois de l’année sont neutralisées par ce paiement mensuel du salaire calculé selon un horaire forfaitaire.

Un salarié qui travaille 35 heures par semaine est donc rémunéré sur la base d’un horaire mensuel de 151,67 heures calculé comme suit :

(35 heures x 52 semaines) / 12 mois

Cependant, dès que des absences se produisent, cela se complexifie.

Les méthodes basées sur des forfaits montrent vite leurs limites.

Selon que l’on se base sur des heures ou des jours, on dénombre jusqu’à huit méthodes différentes pour calculer les absences en paie.

Comme pour les retenues sur salaire, la question se pose de savoir quel est le salaire à payer.

Le montant de ce dernier peut être obtenu :

  • Soit à partir de la déduction des heures d’absence du salaire de base,
  • Soit à partir de la valorisation des heures de travail réellement effectuées.

Pourquoi est-il important de maîtriser ces deux types d’opérations ?

Quelle est la règle légale applicable pour valoriser les absences ?

Quelles sont les autres règles qui permettent de calculer les absences ?

Comment être sûr d’appliquer la bonne méthode ?

1. L’absence de règle légale pour calculer les absences

En effet, aussi surprenant que cela puisse paraître, il n’y a pas de règle légale pour calculer les absences.

La seule règle qui prévaut en matière de retenue pour absence est celle dégagée par la Cour de cassation dans le premier arrêt en la matière en date du 11 février 1982.

Arrêt de principe reproduit à plusieurs reprises, et notamment dans une affaire en date du 24 juin 1992 qui exclut la méthode dite du 30ème.

Celle-ci avait pourtant été retenue par le Conseil de prud’hommes pour calculer la rémunération d’un salarié présent uniquement les 3 premiers jours d’un mois. Pour le conseil, sa rémunération devait être égale à 3/30ème de son salaire.

Par contre, pour la Cour de cassation, ce calcul n’est pas valable.

Selon elle, il convenait de “déterminer le salaire en multipliant la rémunération horaire par le nombre d’heures de travail réellement effectuées”.

La méthode de calcul de la Cour de cassation est celle dite de l’horaire réel.

Comment l’appliquer concrètement ?

2. Application pratique de la méthode de l’horaire réel

Avec ce principe dégagé par la Cour de cassation, le mode opératoire pour calculer la paie d’un mois incomplet ou qui comporte des absences est le suivant :

  1. Déterminer l’horaire réel du mois,
  2. Déterminer le taux horaire applicable pour le mois pendant lequel se produit l’absence,
  3. Calculer l’absence.

Illustrons le principe de la Cour de cassation à partir de l’exemple de notre salarié qui ne travaille que 3 jours dans le mois en raison de son départ le 5 septembre 2023.

Notre salarié travaille 35 h par semaine, à raison de 7 heures par jour du lundi au vendredi.

Son salaire brut mensuel est de 1.895 €.

Il quitte donc l’entreprise le 5 septembre 2023.

Le nombre d’heures réelles du mois de septembre est de 147 heures.

Son taux horaire du mois de septembre est de : 12,89 €/h = 1.895 € / 147 h

Semaine 35Semaine 36 Semaine 37Semaine 38Semaine 39
TravailTravail / AbsenceAbsenceAbsenceAbsence
7 heures14 h     / 21 h35 heures35 heures35 heures

Deux calculs peuvent être mis en œuvre pour obtenir le salaire à payer du mois de septembre.

L’entreprise a le choix entre :

  • Valoriser l’absence à retenir,
  • Ou valoriser les heures de travail réellement effectuées.

a. Calcul du salaire à partir de la déduction de l’absence

  • Heures d’absences : 126 heures = 21 h + (3 x 35 h)
  • Calcul de l’absence : 1.624,14 € = 126 h x 12,89 €/h
  • Salaire à payer : 270,86 € = 1.895 € – 1.624,14 €

b. Calcul du salaire à partir des heures de travail réelles

  • Heure de travail : 21 heures = 7 h + 14 h
  • Salaire à payer : 270,69 € = 21 h x 12,89 €/h

Dans les deux cas, le résultat est identique (les centimes d’écart sont dus aux arrondis des calculs intermédiaires), contrairement à ceux obtenus à partir d’un calcul réalisé avec la méthode basée sur le forfait.

3. Application pratique de la méthode de l’horaire forfaitaire

Démonstration.

Reprenons notre exemple ci-dessus, mais avec cette méthode basée sur le forfait à 151,67 heures.

Le taux horaire est de : 12,49 €/h = 1.895 € / 151,67 h

Semaine 35Semaine 36 Semaine 37Semaine 38Semaine 39
TravailTravail / AbsenceAbsenceAbsenceAbsence
7 heures14 h     / 21 h35 heures35 heures

35 heures

a. Calcul du salaire à partir de la déduction de l’absence

  • Heures d’absences : 126 heures = 21 h +(3 x 35 h)
  • Calcul de l’absence : 1.573,74 € = 126 h x 12,49 €/h
  • Salaire à payer : 321,26 € = 1.895 € – 1.573,74 €

b. Calcul du salaire à partir des heures de travail réelles

  • Heure de travail : 21 heures = 7 h + 14 h
  • Salaire à payer : 262,29 € = 21 h X 12,49 €/h

Constat : avec la méthode basée sur le forfait, les deux calculs donnent des résultats très différents.

4. Avantages et inconvénients de la méthode de l’horaire réel

La méthode de l’horaire réel, préconisée par la Cour de Cassation, présente donc deux avantages importants :

  • Elle est équitable : le salarié est assuré de percevoir le salaire correspondant exactement au travail qu’il a accompli.
  • Elle est cohérente : comme nous l’avons démontré, le résultat est identique quel que soit le mode de calcul retenu par l’entreprise (déduction des heures d’absence ou paiement des heures travaillées).

Cette méthode est celle qu’il convient donc d’appliquer à défaut de disposition conventionnelle contraire qui serait plus avantageuse.

Par contre, elle présente l’inconvénient d’introduire un taux horaire variable d’un mois à l’autre.

C’est l’une des raisons pour laquelle ce calcul des absences de paie est plus complexe, même s’il est possible de le paramétrer dans un logiciel de paie.

Conséquence : cette méthode n’est donc pas toujours appliquée au profit des autres méthodes et notamment des trois préconisées par l’administration.

Lesquelles ?

5. Le calcul des absences en paie basé sur des forfaits

Ces trois méthodes, préconisées par l’administration, sont toutes basées sur des forfaits :

  • Des mois de 30 jours calendaires,
  • Ou des mois de 26 jours ouvrables,
  • Ou des mois de 151,67 heures de travail.

Or en réalité, ce n’est jamais le cas.

  • Ainsi, le calcul des absences en paie par trentièmes consiste à calculer autant de trentièmes que de jours calendaires accomplis ou à retenir autant de trentièmes que de jours calendaires précédant le jour d’embauche.
  • Le principe est le même avec le calcul par vingt-sixièmes. Par contre, dans ce cas, le calcul repose sur le nombre forfaitaire de jours ouvrables par mois.
  • Enfin, le calcul à l’heure qui consiste à diviser le salaire mensuel par le forfait correspondant à la mensualisation (par exemple 151,67 heures pour 35 heures de travail par semaine), puis à multiplier le salaire horaire ainsi obtenu par le nombre d’heures effectuées, ou à retenir le nombre d’heures non effectuées par rapport à 151,67 heures, ce qui donne un résultat identique.

Retenez que ces trois méthodes ont toutes été condamnées par la Cour de cassation.

Les autres méthodes de décompte existantes sont les suivantes :

  • Décompte en jours ouvrés moyens (les mois auraient tous 21,67 jours),
  • Décompte en jours calendaires réels,
  • Décompte en jours ouvrables réels.

6. Le calcul basé sur des jours avec la méthode de l’horaire réel

Le calcul des absences en paie basé sur l’horaire réel peut aussi être transposé dans le cadre d’un calcul basé sur des jours qui permet d’obtenir des résultats identiques à condition de tenir compte des jours ouvrés réels du mois.

Transposons notre exemple ci-dessus pour appliquer la méthode en jours travaillés dans le mois.

  • Nombre de jours travaillés dans le mois de septembre 2023 : 21 jours
  • Détermination du salaire journalier : 90,24 €/j = 1.895 € / 21 j
  • Déduction des jours d’absence : 1.624,32 € = 90,24 €/j × (21 j – 3 j)
  • Salaire dû : 270,68 € = 1.895 € – 1.624,32 €
  • Paiement des jours travaillés : 270,72 € = 90,24 €/j × 3 j

Là encore, dans les deux cas, le résultat est identique à 4 centimes près du fait de l’arrondi à deux décimales dans les calculs intermédiaires.

Notez que cette méthode s’applique aux situations d’absence en cours de mois qui génèrent une suspension du contrat de travail, mais aussi aux cas de d’entrées et de sorties en cours de mois.

Pour conclure sur le calcul des absences en paie

  • Vous êtes prêts pour réaliser les paies de vos salariés lorsque leurs contrats de travail se trouvent suspendus pour cause d’absences diverses dès lors que vous maîtrisez :
    • L’opération pour calculer le temps travaillé ou pour réduire la rémunération mensuelle à due concurrence.
    • Et l’opération pour calculer le temps non travaillé lorsque celui-ci doit être payé.
  • La seule méthode, reconnue par la Cour de cassation, pour le calcul des absences est celle de l’horaire réel.
  • Il importe d’appliquer la même méthode pour tous les salariés.
  • Nous pouvons considérer qu’il est possible d’appliquer une méthode spécifique pour des absences de nature différente. Par exemple, décompte en jours ouvrables pour les congés payés et décompte en jours ouvrés pour les congés sans solde.
    L’important est de respecter le principe de proportionnalité entre le salaire versé et le travail accompli.
  • Même si l’absence n’entraîne aucune réduction de salaire, il convient de la mentionner sur le bulletin de paie afin de pouvoir distinguer la rémunération relative au temps réellement travaillé et celle relative au temps non travaillé.

À propos de l’auteur

Avocat et Médiateur | Plus de publications

Claude conseille les chefs d’entreprise sur les aspects juridiques et RH de leur gestion sociale. Il assure aussi leur défense devant les juridictions dans le cadre des litiges qui les opposent avec les salariés ou les administrations.
Chez Human Avocats, notre équipe d’avocats et de consultants est dédiée à la gestion sociale des entreprises que nous accompagnons en proposant une démarche transverse des problématiques juridiques et opérationnelles des RH et de la paie.

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